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La Cour de cassation confirme, une nouvelle fois, sa jurisprudence en matière de forfait Jours

Date: 25 février 2020
Alerte Droit Social

Dans un arrêt du 6 novembre 2019 [1], la chambre sociale de la Cour de cassation a réaffirmé sa position en matière de forfait jours. En l’espèce, un directeur général salarié soumis à la convention collective des organismes gestionnaires de foyers et services pour jeunes travailleurs du 16 juillet 2003, sollicitait la nullité de sa convention individuelle de forfaits jours sur l’année et sollicitait le paiement du rappel de salaire correspondant aux heures supplémentaires réalisées.

Là où la Cour d’appel de Reims avait débouté le salarié de ses demandes, la Cour de cassation a retenu que les dispositions de la convention collective, « en ce qu’elles ne prévoient pas de suivi effectif et régulier par la hiérarchie des états récapitulatifs du temps travaillé transmis, permettant à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, ne sont pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et à assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, ce dont il se déduisait que la convention de forfait en jours était nulle ».

Par cet arrêt, la Cour de cassation rappelle clairement l’impératif de suivi effectif du temps de travail des salariés en forfait jours, peu important le poste du salarié.

En effet, alors que la cour d’appel a retenu que « l’association était fondée à soutenir que, alors que le salarié en qualité de directeur salarié, avait la charge de s’assurer du respect par l’association de la réglementation sociale, notamment en ce qu’elle vise la durée du travail et son aménagement, la contestation par celui-ci des règles dont il avait la charge est faite de mauvaise foi », la Cour de cassation s’est limitée à regarder si, dans les faits, le suivi du temps de travail du salarié était effectif et régulier.

En pratique, prévoir un entretien annuel relatif à la charge de travail du salarié ou un décompte mensuel des jours travaillés et des jours de repos n’est pas suffisant. Il faut que le suivi du temps de travail du salarié au forfait jours permette de remédier rapidement à une charge de travail qui s’avèrerait incompatible avec une durée de travail raisonnable.

À défaut, les employeurs s’exposent à la nullité des conventions individuelles de forfait en jours sur l’année et à une condamnation au paiement, notamment, des heures supplémentaires revendiquées par les salariés concernés, ainsi qu’à des dommages et intérêts équivalent à 6 mois de salaire pour travail dissimulé.

Pour limiter les risques de condamnation au titre de la convention de forfait jours, les employeurs doivent :

  • vérifier que les dispositions de l’accord collectif de branche auquel ils sont soumis sont conformes aux prescriptions de la jurisprudence validant ou invalidant les dispositions conventionnelles [2];
  • le cas échéant, conclure un accord d’entreprise ou d’établissement qui fixerait les garanties nécessaires à la protection de la sécurité et de la santé des salariés en forfait jours.

Nota bene : compte tenu des nombreuses réformes en matière de durée du travail depuis les lois Aubry, divers dispositifs de « sécurisation » des conventions de forfait jours ont été mis en place. Les dernières mesures de sécurisation sont entrées en vigueur avec la loi 2016-1088 du 8 août 2016 et modifiées par l’ordonnance 2017-1718 du 20 décembre 2017.

Ainsi, sous certaines conditions, une convention individuelle de forfait en jours mise en œuvre en application d’un accord collectif qui ne respecterait pas l’ensemble des prescriptions de la jurisprudence peut tout de même être valablement conclue si l’employeur met œuvre des mesures supplétives suivantes :

  • l’établissement d’un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées rempli et signé par le salarié ;
  • la mise en place de mesures par l’employeur afin de s’assurer que la charge de travail du salarié est compatible avec le respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires ;
  • l’organisation d’un entretien avec le salarié, une fois par an, visant à évoquer sa charge de travail, l’organisation de son travail, l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération.

L’employeur peut également pallier l’absence de dispositions relatives à l’exercice du droit à la déconnexion dans l’accord autorisant la conclusion de conventions individuelles de forfait jours [3].

Aussi, il est recommandé aux entreprises n’ayant pas conclu d’accord récent sur la durée du travail d’être particulièrement attentives aux évolutions de la jurisprudence sur ce sujet et de se mettre en conformité avec les dispositions légales, conventionnelles et jurisprudentielles afin de limiter autant que faire se peut les risques de condamnation au titre d’un rappel d’heures supplémentaires qui, en pratique, constitue souvent un chef de demande important de la part des salariés…


[1] Cass. soc., 6 novembre 2019, n’°18-19752
[2] Exemples: sur l’invalidation de la convention collective du commerce de gros : Cass. soc., 26 septembre 2012, n°11-14.540 ; des bureaux d’études techniques, cabinets d’ingénieurs conseils, sociétés de conseils : Cass. soc., 24 avril 2013, n° 11-28.398 ; du commerce de gros et de détail à prédominance alimentaire : Cass. soc., 4 février 2015, n° 13-20.891
[3] Article L.3121-65 du code du travail

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