Le télétravail: quel avenir pour 2021 ?
En novembre 2019, la DARES1 publiait une étude qui révélait que seulement 3,0% des salariés français pratiquaient le télétravail de façon régulière, au moins une fois par semaine.2
Un an (et une crise sanitaire mondiale) après ce constat, employeurs et salariés ont été contraints de se familiariser et de s’adapter à ce mode d’organisation du travail, aujourd’hui incontournable.
Lors du second confinement qui a été décrété le 30 octobre 2020, le télétravail a été la règle pour tout emploi qui le permet.
Alors que les règles du premier confinement limitaient de façon stricte toute sortie, le confinement hivernal s’est révélé plus souple sur les déplacements, notamment professionnels. Aussi, face à l’hésitation, voire la réticence de certains employeurs, le Ministère du travail a dû apporter une réponse claire : le télétravail à 100% s’impose à l’employeur pendant la période de confinement sur tous les postes « télétravaillables ». Afin d’accompagner les employeurs, le Ministère du travail a également pris soin de consacrer des Questions & Réponses spécifiques au télétravail, régulièrement mis à jour au fil des annonces du gouvernement.
De son côté, la Direction Générale du Travail a rappelé dans une instruction du 3 novembre 2020 le rôle clef des inspecteurs du travail: veiller à l’effectivité du télétravail sur l’ensemble du territoire.
Depuis plusieurs années, le télétravail est un thème récurrent de l’actualité sociale. Néanmoins, sa mise en lumière a été précipitée au cours des derniers mois et en a fait un sujet clef de la continuité et de l’avenir de l’activité économique.
L’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 26 novembre 2020
Des négociations interprofessionnelles très attendues sur le plan national entre les organisations syndicales patronales et salariales ont eu lieu à la fin de l’année 2020 afin de mettre à jour le précédant ANI qui traitait du télétravail, signé il a déjà plus de 15 ans.3
Le nouvel ANI consacré au télétravail a été conclu le 26 novembre 2020 entre les partenaires sociaux dans le but de compléter et redéfinir le cadre juridique du télétravail. Lorsqu’il aura fait l’objet d’un arrêté d’extension au Journal Officiel, ce nouvel outil au service des employeurs aura vocation à s’appliquer à l’ensemble des entreprises appartenant à un secteur professionnel représenté par les organisations patronales signataires (Medef, CPME, U2P). Néanmoins, cet accord est un outil d’aménagement des conditions de travail pour les entreprises dans le contexte actuel.
En effet, dans un souci affiché de pédagogie, l’ANI du 26 novembre 2020 rappelle les bonnes pratiques pour une mise en place réussie du télétravail et les complète en intégrant l’évolution de la loi et de la jurisprudence depuis 2005. Ainsi, sont intégrées de nouvelles dispositions relatives à la sécurité et la santé des télétravailleurs ainsi qu’à leur droit à la déconnexion.
La « télétravaillabilité » en question
Un sondage Harris interactive du 10 novembre, réalisé à la demande du Ministère du travail, a révélé qu’au cours de la première semaine du deuxième confinement, 45% des salariés ont télétravaillé, mais seulement 23% étaient en télétravail à temps plein. De plus, 27% des salariés français travaillent en présentiel sur des tâches pourtant « télétravaillables ». Ces constats ont été fait alors même que le télétravail avait été décrété comme étant la règle.
Face à cette marge d’amélioration, le Ministère du travail a éclairci la question de l’éligibilité d’un poste au télétravail et propose une méthode concrète de définition :
- lister les principales activités de chaque fonction exercée dans l’entreprise, sans oublier celles qui pourraient avoir une valeur ajoutée pour préparer la sortie de crise,
- évaluer les freins et éventuelles difficultés au télétravail pour chacune des activités identifiées ;
- identifier les moyens et conditions pour lever ces obstacles, telles que la fourniture et l’installation d’outils de connexion sécurisés, la définition de plages de disponibilité pour les clients, les managers et chaque acteurs de l’entreprise, etc.
Un assouplissement à la règle du télétravail à 100% pendant le confinement a néanmoins été introduit par le Ministère du travail afin de rompre l’isolement de certains salariés.4 Cette exception visait à prendre en compte des situations difficilesqui avaient été révélées lors du premier confinement.
En cas d’isolement avéré du salarié, l’obligation de l’employeur prédomine en matière de santé et de sécurité et l’autorise par exemple à proposer un retour dans l’entreprise par alternance. Face à ces situations souvent complexes et diverses, l’employeur peut toujours se faire accompagner et conseiller par le médecin du travail.
De plus, le ministère du Travail prévoit désormais, dans son protocole sanitaire en entreprise, mis à jour le 6 janvier 2021, que les salariés en télétravail à 100 % peuvent demander à leur employeur un retour en présentiel un jour par semaine au maximum.
Attention, il est important de garder à l’esprit que pour les salariés télétravaillant que quelques jours par semaine, l’obligation de prise en charge à 50% des frais de transport doit être maintenue sur l’ensemble du mois par l’employeur. Les Questions & Réponses du ministère du travail précisent qu’aucun abattement ne doit être appliqué dès lors que l’abonnement a été utilisés au moins une fois pour le trajet entre la résidence habituelle et le lieu de travail du salarié. De plus, l’employeur devra fournir à ces salariés une attestation de déplacement pour le temps passé dans l’entreprise.
Quid du contrôle de l’activité des salariés ?
L’activité à distance peut interroger les employeurs sur l’opportunité et l’efficacité du contrôle de l’activité des salariés.
Comme pour les missions réalisées au sein des locaux de l’entreprise, la surveillance de l’exécution du travail de ses salariés en télétravail doit respecter leurs libertés individuelles fondamentales (respect de la vie privée, secret des correspondances, etc.). Le contrôle doit respecter un impératif de loyauté et de proportionnalité entre le but recherché et les restrictions apportées aux libertés individuelles.
Concrètement, les salariés doivent être informés au préalable des méthodes mise en place, tout comme le CSE qui doit être informé et consulté sur les procédures de contrôle en cas d’aménagement important modifiant les conditions de travail ou de santé et de sécurité, ainsi que lors de l’introduction de nouvelles technologies (article L. 2312-8 du code du travail). Le ministère du travail rappelle qu’aucun « dispositif ne doit conduire à une surveillance constante et permanente de l’activité du salarié ».
Des pratiques telles que l’utilisation de webcam pour contrôler l’assiduité des salariés ou des appels excessifs, ou l’enregistrement à distance des actions accomplies sur l’ordinateur sont donc à proscrire.